Par Catherine Lara (Intervention présentée à l’occasion du 5ème Colloque International «Emprunts et transferts culturels : du monde luso-hispanophone vers l’Europe», 31 mai/1er juin 2012, Université de Lorraine – Campus Lettres et Sciences Humaines ; sous presse)

INTRODUCTION

S’il est vrai que la science se fonde sur des prémisses d’universalité et d’absolu, dans la pratique, les individus qui l’exercent l’investissent d’une charge de subjectivité, définie par un ensemble de facteurs plus ou moins identifiables – le plus souvent a posteriori du contexte de la recherche –, qui donne à celle-ci une configuration tout à fait particulière. La science française n’échappe pas à ce phénomène et l’archéologie – discipline qui cherche à retracer les cultures passées à travers les vestiges matériels légués par celles-ci – l’illustre de façon éloquente. De fait, parler de l’« archéologie française », ce n’est pas uniquement évoquer l’archéologie pratiquée sur le territoire de l’Hexagone. Ainsi, en 2004, le Ministère des Affaires étrangères français soutenait cent quarante-trois chantiers de fouilles à travers le monde (1). Cette présence actuelle de la France à l’étranger découle, certes, en partie d’un héritage colonial indéniable mais l’on oublie souvent – au nom d’un discours « pseudo » « anti-néocolonialiste » – que les pays d’accueil des missions scientifiques françaises, ont, à leur façon, contribué au développement de la science.

Comment identifier et définir la contribution d’un étranger à l’archéologie française ? Deux cas de figure sont définis à cet effet. Le premier correspond aux archéologues étrangers ne s’étant pas formés en France mais ayant participé et / ou fait progresser une étude française de façon significative. Le deuxième inclut les archéologues étrangers formés en France et ayant, par la suite, contribué par leurs travaux – dans leur pays ou ailleurs ; indépendamment ou en lien avec une mission française – à témoigner des bienfaits de leur parcours universitaire dans l’Hexagone. Comment ces scénarios se manifestent-ils concrètement, et dans quelle mesure ? Le cas de l’Équateur est particulièrement révélateur à ce sujet. Les pages suivantes présentent donc une réflexion sur la présence équatorienne dans l’archéologie française du XXe siècle. Comme nous le verrons, celle-ci fut marquée par trois moments phares : l’époque pionnière, celle de la consolidation institutionnelle et, enfin, celle des missions franco-équatoriennes.

QUELQUES MOTS SUR L’ÉQUATEUR ET L’ARCHÉOLOGIE… 

L’Équateur est un pays andin, situé au nord-ouest de l’Amérique du Sud, entre la Colombie et le Pérou. D’un point de vue géographique, il se divise en trois grands espaces : la côte pacifique, marquée par une forêt tropicale tour à tour sèche ou humide (selon les régions) ; les hauts plateaux andins ou Sierra, et enfin, la plaine amazonienne.

En guise de référence chronologique simplifiée et générale du passé précolombien tel qu’on se le représente aujourd’hui en Équateur, il faut retenir que ce dernier a été divisé en quatre grandes périodes : l’Archaïque / Pré-céramique (9 000 à 3 500 av. J.-C), avec les premières tribus nomades vivant de la chasse et la cueillette. S’en suit la Période dite Formative (3 500-500 av. J.-C.), avec l’apparition des premiers villages agricoles, céramistes et sédentaires. Nous avons ensuite les Étapes du Développement Régional puis d’Intégration, où se développent des noyaux politiques hiérarchisés, caractérisés par l’essor de savoir-faire complexes au niveau technique (agriculture, métallurgie notamment). La conquête inca vers la deuxième moitié du XVe siècle, puis celle des Européens moins d’un siècle plus tard, marquent un tournant culturel décisif dans l’évolution de ces sociétés. Les écrits des chroniqueurs ayant fait partie des expéditions successives, réalisées par les Espagnols dans leur entreprise de conquête du sous-continent dès le XVIe siècle, sont une source de renseignements précieux au sujet des dernières cultures précolombiennes, à l’instar des récits des voyageurs européens des XVIIe et XVIIIe siècles, dont ceux légués par les intégrants de la première Mission géodésique française.

LES PIONNIERS : MONSEIGNEUR FEDERICO GONZÁLEZ SUÁREZ, PAUL RIVET, JACINTO JIJÓN Y CAAMAÑO

Effectuée entre 1735 et 1743 sous la direction de Louis Godin, Pierre Bouguer et Charles-Marie de La Condamine, la première Mission géodésique française contribua à corroborer la théorie de Newton et produisit les premières mesures approximatives du globe terrestre. En 1898, en hommage au prestige de cette expédition et au vu des progrès réalisés au niveau des instruments de mesure géodésiques, celle-ci proposa à la France d’envoyer une deuxième expédition afin de mesurer à nouveau l’arc méridien équatorial (2). C’est ainsi que Paul Rivet rejoignit la deuxième Mission géodésique française, en 1901, en tant que médecin et naturaliste (3). Paul Rivet avait fait ses études au lycée de Nancy et achevé sa formation à Paris (4). À l’occasion de son séjour en Équateur, qui dura jusqu’en 1906, il se passionna pour l’ethnologie et l’anthropologie physique. Il parcourut ainsi une grande partie du pays et recueillit bon nombre d’observations rattachées aux caractéristiques culturelles des groupes ethniques rencontrés, ainsi qu’à leurs ancêtres. De retour en France, il publia l’ensemble de ses études dans une œuvre intitulée Ethnographie Ancienne de l’Équateur, qu’il cosigna avec René Verneau. Cet ouvrage marque le début d’une série d’articles et de publications ayant trait à l’anthropologie équatorienne, que Paul Rivet publia seul ou en collaboration avec Raoul Anthony, Henri Beuchat et René Verneau (5). Certaines de ces contributions sont encore d’actualité dans les sciences sociales contemporaines (6).

À l’époque de l’arrivée de Paul Rivet en Équateur, l’archéologie y était une science encore peu développée (7), exception faite des travaux de quelques étrangers, et surtout d’un Équatorien, Monseigneur González Suárez, pionnier en la matière. Paul Rivet découvrit très vite les publications de celui-ci, allant même jusqu’à recopier et traduire une de ses études en français. D’abord en contact par lettres, Paul Rivet rencontra celui qu’il appela ensuite « son premier maître », en 1902 (8). Les apports du « consciencieux historien de l’Équateur » (9) – tel que Paul Rivet le dénomme aussi – guidèrent ainsi les travaux du Français d’un point de vue théorique et méthodologique, tout en lui ouvrant de nouvelles orientations de recherche tournées vers l’archéologie, l’ethnographie et la linguistique. L’Atlas Archéologique Équatorien, publié par le prélat, devint ainsi le manuel de base des études de Paul Rivet sur le terrain (10), dont l’Ethnographie ancienne de l’Équateur constitue en quelque sorte l’aboutissement.

Dans ce tableau des vestiges précolombiens de l’époque, Paul Rivet reprend certains éléments d’informations recueillis dans les « remarquables études de González Suárez », tel qu’il les qualifie lui-même (11). Dans les cas – certes rares – où Paul Rivet n’aurait pas été en mesure d’observer un type de site en particulier (12), l’ethnologue reprend intégralement les descriptions du prélat à leur sujet. Paul Rivet n’hésite pourtant pas à multiplier les critiques à l’encontre des erreurs commises par celui-ci (13).

Après le séjour de Paul Rivet en Équateur, Marshall Saville, Max Uhle et surtout l’Équatorien Jacinto Jijón y Caamaño (14) continueront de faire progresser les connaissances sur le passé précolombien. Jacinto Jijón y Caamaño qualifie l’œuvre de Paul Rivet – et en particulier l’Ethnographie ancienne de l’Équateur – de fondamentale. Il y signale néanmoins l’« absence totale de perspective historique » (15). Il faut savoir qu’à l’époque de Paul Rivet, les connaissances de la chronologie précolombienne de l’Équateur étaient particulièrement vagues ; grâce à l’application des premières méthodes de datation relative à l’archéologie équatorienne, les travaux de Jacinto Jijón y Caamaño marquèrent un tournant, dans le sens où ils aboutirent à la première chronologie culturelle de l’Équateur précolombien. Par conséquent, le travail de Jacinto Jijón et Caamaño est une contribution notoire aux études de Paul Rivet et donc à l’archéologie française au sens large du terme. Paul Rivet entretiendra d’ailleurs une correspondance avec Jacinto Jijón y Caamaño, dont il publiera quelques travaux dans le Journal de la Société des Américanistes, aux côtés des articles de prestigieuses personnalités des sciences sociales, telles que Claude Lévi-Strauss, Jacques Soustelle ou encore Alfred Métraux (16).

AUX ORIGINES INSTITUTIONNELLES DES ÉCHANGES ARCHÉOLOGIQUES FRANCO-ÉQUATORIENS 

Après les échanges entre Paul Rivet et Jacinto Jijón y Caamaño, le début de la deuxième moitié du XXe siècle semble avoir marqué un « temps mort » au niveau de la collaboration archéologique franco-équatorienne. En fait, il n’en est rien. Ces années constituèrent en effet la gestation de la politique archéologique française contemporaine à l’étranger, la signature des premiers accords culturels entre la France et l’Équateur, et le fleurissement de la science archéologique en Équateur, trois aspects clés du point de vue des échanges franco-équatoriens en matière d’archéologie.

La France et l’archéologie à l’étranger

Archéologues et diplomates ont toujours entretenu, dès l’émergence de l’archéologie en tant que science, des relations particulièrement étroites. […] En nous aidant à comprendre et à respecter des civilisations lointaines dans le temps et dans l’espace, [les archéologues] font, à leur manière, œuvre de paix (17).

L’archéologie française à l´étranger serait ainsi « le fruit d’une longue tradition de curiosité pour les cultures du monde », « au service d’une vision de l’homme héritée des Lumières » (18).

Paradoxalement, les origines du soutien institutionnel du gouvernement français à l’archéologie ne furent pas tout à fait le résultat d’une œuvre de paix : c’est en effet dans le contexte de la course à la domination entre puissances européennes qui précéda la Première Guerre mondiale, que le Ministère des Affaires étrangères français décida de promouvoir des missions archéologiques à l’étranger (19). On s’en doute, les motivations évoluèrent depuis ; aujourd’hui, la Commission consultative des Recherches archéologiques à l’Étranger dépend de la Direction générale de la Coopération internationale et du Développement du Ministère des Affaires étrangères (20).

D’après le discours officiel du gouvernement français, le lien institutionnel entre archéologie et diplomatie « témoigne d’une volonté politique suivie de recherche, de formation et d’échanges, dans un cadre de véritable coopération internationale», et « d’une politique scientifique rigoureuse et bien coordonnée » (21). « Les tâches les plus urgentes sont de faciliter aux pays les moins favorisés l’accès aux techniques des pays développés, et d’encourager l’appropriation des biens patrimoniaux par les populations sur place » (22).

En comparaison avec d’autres aires culturelles, l’action du Ministère des Affaires étrangères en Amérique a mis plus de temps à se développer (23), notamment dans les pays andins (24). Ainsi, c’est sous l’impulsion du Ministère qu’est fondé l’Institut Français d’Études Andines de Lima au Pérou (IFEA), en 1948 (25), à l’initiative de Paul Rivet (26). La présence de l’IFEA et des antennes de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) est à l’origine de nombreux projets menés conjointement avec les scientifiques locaux, ainsi que d’offres de formation en France destinées aux étudiants latino-américains. Si la présence des archéologues est donc bénéfique pour les pays d’accueil et pour le rayonnement de la France, elle est aussi un atout pour le progrès de la science en métropole. Les demandes des pays partenaires incitent ainsi les scientifiques français à explorer de nouvelles méthodes et techniques de recherche et à promouvoir des approches pluridisciplinaires. Par ailleurs, une véritable compréhension de son propre passé ne peut se faire sans celle de celui des autres (27).

Les accords culturels franco-équatoriens : l’exposition d’archéologie équatorienne au Petit-Palais et les premières bourses binationales ; développement de l’archéologie en Équateur

« L’Accord Culturel entre le Gouvernement de la République de l’Équateur et le Gouvernement de la République française », qui constitue le fondement des relations contemporaines entre les deux pays et le point de départ de nombreux projets binationaux dans plusieurs domaines – dont l’archéologie –, fut signé le 5 juillet 1966. Les articles 4, 5 et 6 de l’accord en question au sujet de la coopération scientifique et l’octroi de bourses universitaires nous intéressent tout particulièrement.

Entre 1973 et 1974, comme pour marquer en grande pompe l’intronisation de cet accord, le Petit Palais fut le scénario de la plus remarquable exposition culturelle sur l’Équateur jamais réalisée en France jusqu’à ce jour . « Richesses de l’Équateur – Art précolombien et colonial » – titre de l’exposition – rassembla ainsi plus de cinq cents pièces du patrimoine équatorien et mit l’archéologie à l’honneur. Elle fut placée sous le patronage des gouvernements de l’Équateur et de la France. Le catalogue (29) fut réalisé par Hernán Crespo Toral de la Banque Centrale de l’Équateur : tout en y présentant les pièces de l’exposition, il y décrit les cultures précolombiennes et fait le point sur les connaissances existant à leur sujet à son époque. Il ne serait pas étonnant que cette vitrine archéologique de l’Équateur ait suscité des vocations parmi les visiteurs français.

Les deux premiers archéologues équatoriens qui bénéficièrent des retombées de l’Accord de 1966 furent Ernesto Salazar et Jaime Idrovo. Le premier fit l’équivalent d’une maîtrise à Bordeaux et poursuivit ses études aux États-Unis ; son nom est surtout associé à l’étude de l’époque pré-céramique, où il s’illustra. L’archéologue Jaime Idrovo obtint, quant à lui, une bourse française, afin de réaliser sa maîtrise puis son doctorat en France, au Département d’Archéologie de l’Université Paris I (30). Déjà reconnu en Équateur, Jaime Idrovo s’affirma par la suite comme un des spécialistes les plus renommés de la Sierra centre de l’Équateur, notamment grâce au projet Pumapungo, destiné à l’origine à étudier les vestiges de la capitale septentrionale de l’Empire inca. Le départ d’Ernesto Salazar et Jaime Idrovo coïncide avec l’essor des deux premières écoles d’archéologie équatoriennes, à savoir, celle de l’École Polytechnique du Littoral et de l’Université catholique de Quito, dont le développement fut marqué par l’arrivée au pays de missions étrangères, américaines notamment, dans les années 70 (31). De plus, entre les années 80 et 90, les recettes du boom pétrolier permirent à la Banque Centrale de l’Équateur – dès lors chargée de la gestion de la recherche archéologique – de financer de nombreux projets menés par des professionnels équatoriens et étrangers . Cette conjoncture marque un tournant décisif dans la perception de l’archéologie à l’échelle nationale et de sa mise en valeur dans l’identité culturelle de l’Équateur. C’est dans ce contexte que quatre missions françaises se rendront en Équateur par la suite, entre 1981 et 2000 (33).

LE TEMPS DES MISSIONS

La mission de Jean Guffroy (1981-1983) : les contributions de Napoleón Almeida et Jaime Idrovo

C’est à la mission de Jean Guffroy que l’on doit la première séquence culturelle du Formatif des Andes méridionales équatoriennes (34). Le projet de Jean Guffroy s’inscrit, à l’origine, dans un vaste programme visant à aborder une étude régionale des Andes précolombiennes, où le sud de l’Équateur était soupçonné d’avoir joué un rôle de carrefour culturel clé (35). Les tractations entre la France et l’Équateur en vue de l’exécution du projet commencèrent en 1977. L’étude pluridisciplinaire fut financée grâce aux subventions des gouvernements français et équatorien (36). L’étude fut menée tout au long de trois saisons différentes, sous la direction de Jean Guffroy, et avec la participation sur place de l’Équatorien Napoleón Almeida (37) de la Banque Centrale de l’Équateur, ainsi que d’étudiants français et équatoriens (38).

Le travail de laboratoire autour du matériel récupéré au cours des fouilles fut réalisé par les trois chercheurs opérant à temps complet, à savoir Jean Guffroy, Patrice Lecoq et Napoleón Almeida. Napoleón Almeida prit en charge l’étude du matériel pré-inca (39). Il bénéficia lui aussi d’une bourse du gouvernement français, ce qui lui donna l’occasion de suivre des cours d’archéologie en France pendant deux ans et de réaliser une thèse à partir de son travail au sein de la Mission de Jean Guffroy pour obtenir son doctorat en 1984 (40). La participation de Napoleón Almeida permit de définir l’organisation politique et spatiale de la zone, ainsi que de proposer des pistes de réflexion par rapport à l’origine des groupes ethniques en présence (41).

Les travaux de la Mission furent à l’origine de deux expositions présentant les résultats obtenus, organisées en 1982 à Quito et Loja (42). Ils engendrèrent également de nombreux articles aussi bien en France qu’en Équateur. Outre sa thèse, Napoleón Almeida participa aussi à cette production bibliographique. En 2004, Jean Guffroy publia un autre ouvrage de synthèse des études de la Mission (43), qu’il put compléter avec des références résultant d’autres études équatoriennes réalisées après son séjour en Équateur, auxquelles Jaime Idrovo contribua également.

L’inventaire des Andes Septentrionales (Pierre Gondard / Freddy López) 

Bien que non effectué par des archéologues mais ayant eu une répercussion notoire dans la connaissance pluridisciplinaire des cultures précolombiennes, l’Inventaire Archéologique Préliminaire des Andes Septentrionales de l’Équateur, réalisé par les géographes Pierre Gondard (ORSTOM) et Freddy López, est un bel exemple de coopération franco-équatorienne. Il s’inscrit à l’origine dans un projet d’une durée de neuf ans mené conjointement avec le Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage. L’accord entre l’ORSTOM et cette entité ministérielle équatorienne permit ainsi de dresser cent quarante-huit cartes d’utilisation des sols et des formations végétales en Équateur, avec, en outre, la collaboration du Département de Géographie du PRONAREG (44).

Au cours de leur travail sur le terrain, les géographes furent frappés par la récurrence des structures précolombiennes qu’ils relevaient lors de leurs explorations. Alertant Hernán Crespo, alors responsable de la section culturelle de la Banque Centrale Équatorienne, et avec l’aval du Ministère de l’Agriculture équatorien, les scientifiques proposèrent ensuite un projet d’inventaire archéologique des Andes septentrionales. Le projet en question fut financé par la Banque Centrale de l’Équateur et bénéficia de l’assistance technique de l’ORSTOM (45), ainsi que de celle d’archéologues (46), notamment de l’Équatorien José Echeverría (47). Le travail aboutit à un ouvrage qui comprend des photographies aériennes des sites archéologiques répertoriés, des références aux chroniqueurs (48), ainsi qu’aux travaux de Jacinto Jijón et Caamaño, récurrentes dans l’interprétation des structures examinées.

La mission de Francisco Valdez et Jean-François Bouchard

Quelque peu en marge des trois boursiers équatoriens qui poursuivirent leurs études en France entre la fin des années 70 et le début des années 80, quoiqu’à la même époque, Francisco Valdez fit ses études à l’Université de Paris X Nanterre – aujourd’hui Paris-Ouest La Défense –, où il obtint un doctorat en Ethnologie préhistorique en 1984. Francisco Valdez est le seul archéologue équatorien à ce jour à avoir intégré un organisme de recherche français (en l’occurrence l’IRD, ex-ORSTOM), ce qui lui permit de mener à bien trois projets d’envergure en Équateur, incarnant ainsi sans surprise la contribution par excellence de l’Équateur à l’archéologie française dans les trente dernières années. Nous nous attarderons sur le premier de ces projets, qui fut, en fait, réalisé avant l’entrée de Francisco Valdez à l’IRD, sous l’auspice de la Banque Centrale équatorienne, et en collaboration avec Jean-François Bouchard, archéologue français du CNRS. En effet, les deux autres (Projets Esmeraldas et Zamora-Chinchipe), sortent de notre cadre chronologique, le XXe siècle.

La zone de La Tolita (province dʼEsmeraldas) fut le cœur d’une des manifestations culturelles précolombiennes les plus brillantes du littoral nord de l’Amérique du Sud. Paradoxalement, ce raffinement culturel – reflété par un savoir-faire remarquable dans l’art céramique et, surtout, l’orfèvrerie – valut aux sites archéologiques de cette région, à cheval entre l’Équateur et la Colombie actuelles, d’être implacablement ratissés par les pilleurs dès le début du XXe siècle. Tenant compte de ces antécédents, en octobre 1982, le Musée de la Banque Centrale de l’Équateur démarra le Projet archéologique pluridisciplinaire La Tolita, en vue de promouvoir la création d’un parc archéologique appelé à récupérer les vestiges de cette brillante culture (49). Le Musée eut ainsi recours aux services de l’archéologue Francisco Valdez. Ce projet fut exécuté entre 1983 et 1992.

En 1983, afin d’optimiser la portée régionale des recherches effectuées à La Tolita, la Banque Centrale décida de les rattacher au projet français El Morro / Tumaco, alors en cours en Colombie, et signa un accord de coopération avec le CNRS (ex-URA) et l’IFEA. C’est ainsi que se forma la Mission archéologique française de La Tolita, sous l’égide de Jean-François Bouchard (50). Cette mission, pluridisciplinaire elle aussi, travailla avec Francisco Valdez entre 1984 et 1988. Les études de Francisco Valdez et Jean-François Bouchard (51) permirent dès lors d’établir la chronologie culturelle du secteur de La Tolita, complétant par-là même celle des homologues colombiens travaillant sur la même culture, plus au Nord, ainsi que celle des archéologues équatoriens et étrangers qui exploraient les cultures voisines. D’un point de vue anthropologique, la contribution de la chercheuse équatorienne Alexandra Yépez est également à souligner (52).

Vers les années 90 : deux nouvelles expositions d’archéologie équatorienne en France

En 1989, la Maison de l’Amérique latine accueillit à Paris l’exposition d’archéologie « L’Équateur, la Terre et l’Or », certes plus modeste que celle du Petit-Palais, mais tout aussi significative dans le sens où elle mit en avant les progrès effectués depuis, en Équateur, dans le milieu archéologique, notamment grâce aux recherches de Francisco Valdez et ses collègues, toujours avec le partenariat de la Banque Centrale équatorienne. Cinq ans plus tard, du 14 juin au 2 octobre 1994, ce fut au tour du Conseil général de la Moselle Metz-Arsenal d’accueillir l’exposition « L’or des Dieux, l’or des Andes », centrée sur la métallurgie précolombienne andine, incluant, bien entendu, l’Équateur. Coordonnée par des entités politiques françaises et andines, l’exposition fut quasi intégralement documentée par des archéologues péruviens, colombiens et équatoriens (53).

La mission de Stéphen Rostain et Ernesto Salazar En 1995, une nouvelle mission archéologique impulsée par le Ministère des Affaires étrangères français et l’IFEA arriva en Équateur, sous la direction de Stéphen Rostain. Après l’exploration des frontières sud et nord du pays, entreprises par les missions respectives de Jean Guffroy et Jean-François Bouchard, le projet de Stéphen Rostain se tourna vers une zone culturellement différente, à savoir l’Amazonie et, plus concrètement, la vallée de l’Upano (province de Morona-Santiago), parsemée de monticules en terre, de nature jusqu’alors énigmatique. Grâce à une convention passée entre l’IFEA, l’Université Catholique de Quito et le Musée de la Banque Centrale Équatorienne, le projet fut co-dirigé par l’Équatorien Ernesto Salazar et compta sur la participation d’étudiants français et équatoriens (54), aux côtés d’autres institutions locales et étrangères.

Le travail visait à cartographier et analyser l’organisation des constructions en terre en question, ainsi qu’à étudier les cultures précolombiennes de la zone (55), alors très mal connues. Pour ce faire, les interventions s’articulèrent en deux parties : le projet Sangay-Upano, mené entre 1996 et 1998, et le projet Río Blanco, entre 2000 et 2004. Les résultats de l’étude aboutirent à la découverte d’une culture ancienne aux pratiques complexes, bien éloignées de la représentation occidentale courante des « sauvages » amazoniens. En 1997, les travaux aboutirent à un article conjoint écrit par Stéphen Rostain et Ernesto Salazar. Ce dernier publia également trois comptes rendus des recherches dans des revues et compilations en Équateur et à l’étranger.

La mission de Francisco Valdez et Jean Guffroy

En 1999, l’IRD démarra un projet d’inventaire archéologique de la province de Zamora-Chinchipe, dirigé par Jean Guffroy et Francisco Valdez (56). Destiné à identifier la nature et l’évolution des occupations précolombiennes d’une province peu connue, mais présumée comme essentielle au vu des découvertes effectuées du point de vue régional (57), ce projet – le premier dans son genre dans la province – réussit ainsi à identifier plus de trois cents sites archéologiques, dont le spectaculaire complexe architectural formatif de Santa Ana-La Florida – plus de cinq mille ans d’ancienneté –, marquant ainsi un tournant dans les recherches archéologiques portant sur l’Amazonie et son rôle dans la formation du monde andin (58). La présence de l’IRD à Zamora-Chinchipe fut renforcée par le biais d’un accord passé avec l’Institut National du Patrimoine Culturel équatorien.

En définitive, la contribution de l’Équateur à l’archéologie française du XXe siècle a connu une évolution en trois étapes. La première, que l’on pourrait qualifier de pionnière, est représentée par les apports de Jacinto Jijón y Caamaño aux études de Paul Rivet. Vient ensuite une période marquée par le développement de la politique archéologique française à l’étranger, mené en parallèle avec l’essor de l’archéologie en Équateur, et la signature de l’Accord Culturel de 1966 entre la France et l’Équateur. Ce contexte favorable permit finalement d’ouvrir la voie à ce que l’on pourrait considérer comme le temps des missions archéologiques franco-équatoriennes. La première fut celle de Jean Guffroy à Loja, qui compta sur la participation de l’archéologue équatorien Napoleón Almeida, puis sur la contribution ultérieure de Jaime Idrovo, ce dernier s’illustrant parmi les spécialistes de l’archéologie du sud de l’Équateur. La deuxième étude binationale fut celle de la mission archéologique La Tolita, avec le Français Jean-François Bouchard et l’Équatorien Francisco Valdez ; ce projet allait introniser l’archéologue équatorien comme principal contributeur direct de l’Équateur à l’archéologie française à l’étranger. En 1999, on retrouvera effectivement aussi bien Francisco Valdez que Jean Guffroy (IRD) dans le projet Zamora-Chinchipe. Il faut finalement souligner la contribution de l’archéologue Ernesto Salazar, en partie formé en France et reconnu dès les années 80 dans le domaine de l’archéologie précéramique ; celui-ci co-dirigea ensuite le projet de Stéphen Rostain autour des bâtisseurs de monticules de la vallée de l’Upano, en Amazonie.

Pour revenir aux catégories ébauchées en introduction par rapport à la nature de l’apport équatorien à l’archéologie française, il ressort que Jacinto Jijón et Caamaño est l’intégrant le plus saillant du premier cas de figure proposé, à savoir celui d’un chercheur non formé en France mais dont l’apport représenta une évolution significative par rapport à une étude française, en lʼoccurrence celle de Paul Rivet. L’on pourrait, en outre, inclure ici le cas de la dizaine d’étudiants de l’Université Catholique de Quito et de l’École Polytechnique du Littoral, qui participa aux missions françaises et se professionnalisa ensuite en Équateur. Le deuxième cas de figure – constitué par les chercheurs formés en France et ayant ensuite développé leur carrière dans leur pays d’origine, éventuellement en lien plus ou moins direct avec une mission française – correspond aux trajectoires dʼErnesto Salazar, Jaime Idrovo, Napoleón Almeida et Francisco Valdez.

Que nous réserve le XXIe siècle du point de vue de la présence archéologique en Équateur et de sa composante équatorienne ? Les années 2000 ont connu quatre projets franco-équatoriens particulièrement productifs pour l’archéologie locale et régionale. Ces perspectives, certes encourageantes, sont pourtant quelque peu ternies par l’état actuel de l’archéologie en Équateur, en crise du fait de défaillances au niveau des institutions étatiques et des centres de formation archéologiques. À l’heure de la mondialisation, il faut espérer que l’avènement de projets non pas binationaux mais plurinationaux contribuera à sortir de cette impasse l’archéologie équatorienne comme partie intégrante de la science universelle.

NOTES :

(1) Jacques CHIRAC, « Avant-propos du président de la République », in Archéologies. Vingt ans de recherches françaises dans le monde, Pont-l’Abbé, Maisonneuve et Larose-ADPF-ERC, 2004, non paginé.

(2) Christine LAURIÈRE, Paul Rivet, le savant et le politique, Paris, Publications Scientifiques du Muséum National d’Histoire Naturelle, 2008, p. 35.

(3) Francisco VALDEZ, «La investigación arqueológica en el Ecuador: reflexiones para un debate», Revista del Patrimonio Cultural del Ecuador, número 2, 2010, p. 8.

(4) Francisco VALDEZ, op. cit., p. 16.

(5) Jacinto JIJÓN Y CAAMAÑO, Antropología Prehispánica del Ecuador (1951), Quito, Co-édition Ambassade d’Espagne, Agence Espagnole de Coopération Internationale, 1997, p. 96.

(6) Francisco VALDEZ, op. cit., pp. 8-9.

(7) Christine LAURIÈRE, op. cit., p. 98.

(8) Ibidem, p. 94.

(9) Paul RIVET, Raoul ANTHONY, « Étude anthropologique des Races précolombiennes de l’Équateur. Recherches anatomiques sur les ossements (os des membres) des abris sous roches de Paltacalo », Bulletins et Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris, Ve Série, tome 9, 1908, p. 315.
(10) Christine LAURIÈRE, op. cit., p. 94.

(11) Paul RIVET, René VERNEAU, Ministère de l’Instruction Publique, Mission du Service Géographique de l’Armée pour la Mesure d’un arc de méridien équatorial en Amérique du Sud sous le contrôle scientifique de l’Académie des Sciences 1899-1906, Tome 6. Ethnographie ancienne de l’Équateur, Paris, Gauthier-Villars Imprimeur-Libraire, 1912, p. 29.

(12) Ibidem, p. 126.

(13) Ibidem, p. 12, p. 22.

(14) Christine LAURIÈRE, op. cit., p. 98.

(15) Jacinto JIJÓN Y CAAMAÑO, op. cit., p. 96.

(16) Christine LAURIÈRE, op. cit., p. 303.

(17) Michel BARNIER, « Préface de M. Michel Barnier, Ministre des Affaires Étrangères », in Archéologies. Vingt ans de recherches françaises dans le monde, op. cit.

(18) Jacques CHIRAC, op. cit.

(19) Jean LECLANT, Paul BERNARD, « Des archéologues et des diplomates : un siècle d’archéologie française au Moyen-Orient », in Archéologies. Vingt ans de recherches françaises dans le monde, op. cit., p. 22.

(20) Ève GRAN-AYMERICH, « La ʻCommission des fouilles’ au Ministère des Affaires étrangères », in Archéologies…, op. cit., p. 31.

(21) Bertrand LAFONT, Jean-Claude JACQ, « Archéologie française à l’étranger : acteurs, moyens et enjeux actuels », in Archéologies…, op. cit., p. 40.

(22) Ibidem, p. 42.

(23) Ève GRAN-AYMERICH, op. cit., p. 34.

(24) Ibidem, p. 35.

(25) Jean LECLANT, Paul BERNARD, op. cit., p. 30. Voir aussi Stéphen ROSTAIN, « Des mers de glace à la Terre de Feu. Archéologie française en Amérique », in Les nouvelles de l’archéologie, n° 111-112, 2008, p. 5.

(26) Georges LOMNÉ, communication personnelle.

(27) Michel GRAS, « L’archéologie en question », in Archéologies…, op. cit., p. 50.

(28) Darío LARA, Histórica conmemoración: 40 años de la primera comisión mixta Franco-Ecuatoriana, 1966-2006, Quito, Comisión Nacional Permanente de Conmemoraciones Cívicas, 2006, p. 17.

(29) L’Équateur, la terre et l’or, Paris, Librairie Séguier, 1989.

(30) Jaime IDROVO, «Aspectos funerarios entre los cañaris de Ingapirca», Maîtrise d’Archéologie UER d’Art et Archéologie, Paris I, inédite, 1979, s/p.

(31) Francisco VALDEZ, op. cit., p. 13.

(32) Ibidem, p. 15.

(33) Ibidem, p. 9.

(34) Idem.

(35) Napoleón ALMEIDA, «Les ʻZarzas’, un groupe culturel tardif du sud de la province de Loja, en Équateur», Thèse pour le doctorat du 3e cycle, Université Paris I-Panthéon Sorbonne, inédit, 1984, p. 14.

(36) Jean GUFFROY (éd.), Loja préhispanique, recherches archéologiques dans les Andes méridionales de l’Équateur, Paris, Éditions Recherche sur les Civilisations, 1987, p. 9. Voir aussi Jean GUFFROY, Catamayo Precolombino, Paris, Co-édition UTPL / Banco Central del Ecuador, IFEA, IRD, 2004, p. 13.

(37) Idem, Catamayo Precolombino, op. cit., p. 13.

(38)  Idem, Loja préhispanique…, op. cit., p. 41.

(39) Napoleón ALMEIDA, op. cit., p. 3 ; Jean GUFFROY (éd.), Loja préhispanique…, op. cit., p. 10, p. 41 ; Idem, Catamayo Precolombino, op. cit., p. 14 ; Jean GUFFROY, Investigaciones arqueológicas en el Sur de la Provincia de Loja, Loja, Misión Arqueológica de Loja / Banco Central del Ecuador, s / d, p. 4.

(40)  Napoleón ALMEIDA, op. cit., p. 5.

(41)  Jean GUFFROY (éd.), Loja préhispanique…, op. cit., p. 341.

(42)  Jean-Paul DELER, «El IFEA en la zona andina», CULTURA, Revista del Banco Central del Ecuador, vol. V, n° 15, 1983, p. 31.

(43)  Jean GUFFROY, Catamayo Precolombino, op. cit., p. 13.

(44)  Pierre GONDARD, «El espacio nor-andino ecuatoriano a principios del siglo XVI», in Segundo MORENO YÁNEZ,  Antropología del Ecuador, Quito, Abya-Yala, 1996, p. 105.

(45)  Pierre GONDARD, Freddy LÓPEZ, Inventario Arqueológico Preliminar de los Andes Septentrionales, Quito, Banco Central del Ecuador, 1983, p. 13.

(46)  Ibidem, p. 81.

(47) Aux côtés du Français J. Bérenger, ce dernier avait publié un « Projet méthodologique pour l’enregistrement des sites archéologiques des Andes Septentrionales Équatoriennes : Système régional de nomenclature et fiche de prospection », paru en 1975 dans le numéro 7 du bulletin Sarance de l’Instituto Otavaleño de Antropología.

(48) Pierre GONDARD, «El espacio nor-andino ecuatoriano a principios del siglo XVI», op. cit., p. 105.

(49) Francisco VALDEZ, Proyecto Arqueológico La Tolita (1983-1986), Quito, Fondo Arqueológico del Museo del Banco Central «Guillermo Pérez Chiriboga», 1987, p. 5.

(50) Ibidem.

(51) Jean-François BOUCHARD, «Evidencias de relaciones interculturales en la región norte (sur de Colombia y norte de Ecuador)», in Jean-François BOUCHARD, Mercedes GUINEA, Proceedings, 46 Congreso Internacional de Americanistas, Amsterdam, Netherlands, 1988, Relaciones interculturales en el área ecuatorial del Pacífico durante la época precolombina, Oxford, Bar International Series 503, 1989, p. 38.

(52) Francisco VALDEZ, «La investigación arqueológica en el Ecuador…», op. cit., p. 9.

(53) L’or des Dieux, l’Or des Andes, Metz, Éditions Serpenoises, 1994.

(54) Ernesto SALAZAR, «De vuelta al Sangay: investigaciones arqueológicas en el Alto Upano, Amazonía ecuatoriana», Bulletin de l’Institut Français d’Études Andines, n° 27 (2), 1998, p. 238. Voir aussi  Francisco VALDEZ, «La investigación arqueológica en el Ecuador…», op. cit., p. 9.

(55) Stéphen ROSTAIN, «Secuencia arqueológica en montículos del valle del Upano en la Amazonía ecuatoriana», Bulletin de l’Institut Français d’Études andines, n° 28 (1), 1999, p. 53.

(56) Voir Jean GUFFROY, Francisco VALDEZ, «Resultados de la etapa de reconocimiento (1999-2000) y proyecto de investigación arqueológica (2001-2004) en la provincia de Zamora-Chinchipe», Informe preliminar, INPC, inédit, 2001.

(57) Geoffroy de SAULIEU, Lino RAMPÓN ZARDO, Colección arqueológica de Morona-Santiago del Museo Amazónico de la Universidad Politécnica Salesiana. Una introducción a la Amazonia Ecuatoriana prehispánica, Quito, Abya-Yala, 2006, p. 14.

(58) Francisco VALDEZ, «La investigación arqueológica en el Ecuador…, op. cit., p. 9.

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