Par Catherine Lara (2011)

Le parc archéologique et écologique Rumipamba -32 hectares- est situé à Quito, entre les avenues Occidental et Mariana de Jesús (paroisse Altamira, aux pieds du Pichincha). Il fut découvert en 1996 lors d’une prospection, mais son étude approfondie commença en 1998, suite à la découverte de contextes funéraires. Dès lors, l’ex-FONSAL et la Banque Centrale de l’Équateur prirent le gisement en charge (Ugalde et al., 2009). Depuis, les recherches ont été dirigées par Victoria Domínguez, Mónica Bolaños, Manuel Coloma, Rodrigo Erazo, María Fernanda Ugalde, Rosalba Chacón et Angelo Constantine, entre autres. Le site se trouve actuellement sous la tutelle de la Direction Métropolitaine de Culture.

Le gisement se trouve sur une sorte de terrassement qui domine la ville, aux alentours du «ravin Rumipamba». Par analogie au cas du site voisin de La Florida, il semblerait que ce genre de relief ait été privilégié dans le patron spatial d’établissement des cultures précolombiennes qui peuplèrent l’actuelle ville de Quito, sans oublier bien entendu la présence du lac de Iñaquito, qui s’étendait alors entre la moderne avenue Mariana de Jesús et le secteur de Cotocollao. Les terrains où se situe Rumipamba appartenaient à María Augusta Urrutia. A peine 5% du site a été étudié, mais les fouilles effectuées ont déjà révélé quelques informations au sujet des populations qui l’occupèrent.

Le musée en tant que tel comprend la construction connue sous le nom de «maison de l’hacienda», qui inclut elle-même un laboratoire équipé, des salles d’exposition ainsi qu’une «salle multimédia». La visite, assurée par les guides du musée, s’organise autour de cinq contextes spécifiques (dont quatre seulement ont pu être visités en cette occasion), représentatifs des types d’occupations qui ont caractérisé le site. Ces-derniers sont protégés par des toitures et comptent de panneaux d’explications. En termes généraux, le registre matériel récupéré ici comprend de la céramique du Formatif Tardif, ainsi que des tombes et des offrandes associées à la Période du Développement Régional, des vestiges de structures domestiques et des tombes peu profondes (inhumations secondaires probablement) avec de la céramique modestement décorée associée à la Période d’Intégration, qui représente ici les niveaux d’occupation les plus denses. Des outils en pierre ont également été récupérés dans ce secteur.

Le premier contexte faisant l’objet du parcours touristique consiste en une série de murs en pierre orientés vers le Pichincha. Ces-derniers ont été restaurés; deux hypothèses ont été formulées sur leur origine. La première leur attribue la fonction de sentiers situés à la manière de bornes pour guider les pèlerinages vers le volcan (considéré comme sacré de ce point de vue-là, ce qui associerait Rumipamba à un lieu de culte, voire à un «observatoire astronomique» selon certains). Un crâne humain avec offrandes a été trouvé dans une poterie au pied d’un des murs, ce qui semblerait aller dans le sens d’un statut particulier accordé à ces-derniers. La deuxième hypothèse propose plutôt que ces murs auraient aussi pu avoir rempli une fonction de contention des matériaux volcaniques en provenance du Pichincha. En fait, ces deux hypothèses ne se contredisent pas: ainsi, d’un point de vue comparatif, bien qu’à partir d’un contexte certes éloigné, il convient de signaler que sur le site Santa Ana-la Florida (canton Palanda, province de Zamora Chinchipe), les inhumations se trouvent au pied de murs qui exercent également une fonction de contention, raison pour laquelle l’usage fonctionnel n’est pas forcément excluant de l’usage rituel.

En termes généraux, deux niveaux d’occupation ont été identifiés dans ce secteur: le premier, conformé par des ossements dispersés datant du Formatif tardif (qui s’étendent jusqu’au campus de l’Université Technologique Équinoxiale). Il n’est pas à exclure que les habitants de cette époque aient été surpris par quelque phénomène d’origine volcanique. Le deuxième niveau pour sa part a été associé à la Période du Développement Régional.

Le deuxième contexte présenté dans le circuit est l'»unité 2″. Celle-ci a révélé trois niveaux d’occupation culturelle: le premier (Période d’Intégration) est conformé par les vestiges d’une hutte circulaire («bohío») au sol compact et aux blocs en pierre fiscille. Une inhumation orientée vers l’est a été trouvée à l’extérieur de cette structure. Quant au deuxième niveau d’occupation, il consiste en une série de murs de contention, alors que le troisième est représenté par un foyer.

A son tour, l’unité 3 (fin du Développement Régional/Début Intégration) se caractérise par la présence de «plateformes», parmi lesquelles des poteries qui semblent avoir été intentionnellement brisées dans le cadre de quelque pratique rituelle, ont été trouvées. Une de ces «offrandes» contenait des ossements d’animal. Il s’agit d’un type de poterie probablement originaire du Littoral et de l’Amazonie (pour une analyse détaillée des tombes et des traces d’échanges à longue distance, voir Ugalde, 2007).

Enfin, l’unité 5 présente deux foyers associés à la Période d’Intégration dans ce qui est considéré comme un endroit de préparation des aliments ou d’élaboration de céramique. Ce niveau se superpose à un «bohío» avec des piliers, des fibres végétales, un sol en terre battue et brulée associés à la Période du Développement Régional.

Tel que l’indique le nom complet du parc, Rumipamba est également une réserve écologique, dont la flore et la faune variées surprennent dans un contexte aussi proche de la ville. Les propriétaires des lieux ont donc fait un effort pour récupérer l’entourage naturel du site, où l’on trouve un grand nombre de plantes vernaculaires telles que le allku, la huilca, le capulí, la verveine et d’autres variétés de plantes médicinales. Les fouilles archéologiques ont révélé que l’alimentation des habitants précolombiens du secteur se basait principalement de grains, bien qu’il soit plus que certain qu’ils connaissaient et dominaient l’usage des autres ressources naturelles appartenant à leur habitat.

En termes généraux, il est clair que Rumipamba -où des ateliers textiles contemporains du site La Florida auraient été trouvés (Molestina, communication personnelle)-, dénote un statut «moindre» par rapport à La Florida, ce qui redouble son intérêt, puisqu’il abrite sans doute des informations potentielles au sujet des secteurs moins favorisés de la population de l’époque. Il est à espérer que les diverses recherches qui sont actuellement en train d’être menées dans la région de Quito contribueront à reconstruire le vrai puzzle précolombien qui eut pour scénario l’actuelle capitale de l’Équateur.

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