«… Tu as réalisé la traduction. Pourquoi un large public français ne bénéficierait-il pas de ce travail d’un immense intérêt? Qui viendra reprendre aujourd’hui ces belles et bonnes tâches après toi? » J.M
La traduction est une facette majeure de notre blog, en se rapportant aux échanges culturels entre l’Équateur et la France. Cette phrase nous a aussi motivés à rendre justice à Danielle Pier et ce à deux niveaux: en faisant mieux connaître son œuvre de traductrice des lettres équatoriennes et en mettant en valeur son «véritable coup de cœur»:«elle a aimé les lettres équatoriennes et elle répondait de tout son cœur à ceux qui voulaient la mettre à contribution pour traduire des ouvrages en langue espagnole» (2).
Une autre partie de cet hommage sera consacrée à la traduction du livre en français de: Viajeros Franceses al Ecuador en el siglo XIX/Des voyageurs français en Équateur au XIXe siècle et nous poursuivrons notre dessein avec un texte inédit, cette fois-ci en espagnol, intitulé «Indigenismos literarios y reformas agrarias en las obras de J. Lara, M Scorza y G.A. Jácome» (3).
La première partie rappelle l’état de la question: évolution de l’indigénisme avant et après les réformes agraires dans les trois pays; bilan nuancé de l’indigénisme littéraire et ses prolongements dont s’inspirent leurs auteurs (deux premiers chapitres). Le troisième chapitre situe chaque romancier dans son contexte régional, montre son approche personnelle du problème indien et ses distances prises aves les indigénismes politiques. La deuxième partie met en relief la création romanesque dans les œuvres des trais auteurs. Elle repose sur une analyse comparative des personnages, de l’espace, des langages et des techniques littéraires. L’étude de l’élaboration et des fonctions des personnages révèle les rapports entre réalité et fiction; l’analyse psychologique des comportements montre le climat humain suggéré par les œuvres. Le chapitre sur l’espace étudie les degrés de mimétisme et de déviance par rapport à une réalité extra-textuelle, puis la toposémie fonctionnelle; la portée symbolique de l’espace est ensuite dégagée. Le dernier chapitre étudie les créations langagières, distingue les notions de bilinguisme et de diglossie, analyse l’art poétique des trois auteurs et les manifestations du réalisme magique chez Scorza et Jácome.
Les romanciers choisis ont ouvert de nouvelles perspectives au niveau des thèmes et de l’écriture. (D.P).
DANIELLE PIER: UNE VIE DE COURAGE, DE DROITURE ET DE FIDÉLITÉ
Étudiante acharnée, elle obtient le couronnement d’un cursus universitaire remarquable en obtenant, en juin 1996, son Doctorat en Littérature Ibéro- américaine, à Nanterre, avec mention «très honorable».
L’enfant Danielle est turbulente et heureuse; ses parents travaillent à Suresnes, près de Paris, aux abords du Mont Valérien; mais ils ont gardé leur maison à Meyronne et, les vacances venues, tout le monde s’entasse dans la petite voiture, avec les bagages et les animaux familiers, vers l’évasion.
Paul travaille avec ardeur pour aménager la maison taillée dans le roc. L’enfant s’intéresse et veut aider son père.
Danielle retrouvait vite son âme d’enfant pour parler de ce vert paradis d’autrefois.
Mais voici qu’à l’âge de 15 ans, Danielle subit une attaque cruelle de poliomyélite; ses jambes commencent à se paralyser; elle se voit déjà diminuée physiquement.
Un combat pour la vie: tout le long de son parcours, Danielle connaîtra plusieurs accidents, elle subira des opérations compliquées sur bras et jambes, et des trépanations.
À chaque fois, elle en sort à nouveau diminuée. Danielle aurait pu écrire sur le thème Mes Hôpitaux le long roman d’un pauvre corps que la vie a martyrisé. Elle se déplace d’abord avec des béquilles, puis elle ne sort plus guère de son fauteuil où nous l’avons connue.
Mais Danielle est maintenant lancée: ce combat, elle va le gagner! Elle apprend l’espagnol, va en Espagne avec un Groupe de Handicapés, s’initie aux richesses d’une immense culture.
Danielle s’inscrit à l’Université de Nanterre. Elle passe le DEUG et la Licence, toujours en s’appuyant sur des cours par correspondance. Nous la voyons en salle d’examen avec sa planche inclinée qui lui set de pupitre. Elle réussit brillamment toutes les épreuves.
Danielle va poursuivre un parcours particulièrement brillant. Elle choisit d’explorer un courant littéraire avec lequel son âme généreuse est en parfaite osmose: l’indigénisme et ses développements: le néo-indigénisme. Ce courant est daté: il correspond aux Réformes Agraires que Danielle étudie dans les 3 Pays Andins: Bolivie, Pérou, Équateur. Ce courant regroupe des auteurs différents, tous attachés à faire ressentir au lecteur la grandeur des peuples autochtones, leur dignité, face à diverses formes d’oppression et de rejet de la part d’une ethnocratie dominante. Il a produit de très belles pages.
Son mémoire de Maîtrise, soutenu en 1992, compare un auteur péruvien -Manuel Scorza, auteur du cycle de la Guerra silenciosa– et un équatorien: Gustavo Alfredo Jácome, auteur de Porque se fueron las Garzas. Elle éprouve un véritable «coup de cœur» pour ce beau et original roman. Elle découvre cet auteur équatorien, Monsieur Jácome, avec qui elle entretient une correspondance régulière.
Son mémoire de DEA, soutenu en 1994, nous détaille l’indigénisme en Bolivie, avec les œuvres de Jésus Lara.
«Une belle thèse littéraire» dira le regretté professeur Minguet. Un travail impressionnant qui aboutit à un ouvrage de plus de 1.000 pages, pour lequel Danielle a eu la chance de rencontrer Madame la Professeure Janine Potelet, sa Directrice de Thèse, qui a su placer l’étudiante dans un rapport de confiance qui l’a beaucoup encouragée.
Mais le combat pour s’insérer dans la vie active, Danielle ne l’a pas gagné. Pourtant c’était son but, vital pour elle. Question de dignité. Danielle déteste se voir tributaire des autres.
Danielle développe un courage immense, une ténacité à toute épreuve dans tout ce qu’elle fait. Enfin, munie de sa Thèse, elle se lance dans des traductions littéraires.
Danielle se plonge dans l’étude du quetchua et décortique les créations lexicales de Jácome.
Sa traduction est publiée par L’Harmattan. Elle est appréciée des milieux universitaires.
Mais le monde de la traduction et celui de l’édition sont sans pitié et pleins de chausse-trapes. L’ouvrage bénéficie de trop peu de publicité et n’a pas le succès espéré.
Danielle qui a mis dans ce travail son cœur, ses vastes connaissances, sa sensibilité, sera terriblement déçue.
Danielle a mené en permanence un combat pour la justice:
Avec l’APF (Association des Paralysés de France), Danielle garde le souvenir d’une grande manifestation de Handicapés pour la reconnaissance de leurs droits. Nous la voyons Rue de Rivoli avec ses Amies. Danielle a l’esprit militant; elle veut que l’on reconnaisse toute leur place aux humbles, aux exclus, aux pauvres, à tous ceux qui semblent marqués par une différence, aux «pas comme les autres».
Danielle avait trop souffert de certains faits qui avaient laissé en elle des plaies ouvertes: un jour, elle fait une chuta dans un magasin et entend dire par un client: «quand on ne tient pas sur ses jambes, on reste chez soi….». Se présentant à un contrôle, elle entend le médecin demander à une secrétaire: «elle sait lire au moins celle-là? …»
Danielle entre tout naturellement à France–Amérique Latine (FAL) où elle apporte une très grande compétence, spécialiste des Pays Andins et toujours au fait de l’actualité latino-américaine. Elle participe à toutes les manifestations et se plait dans une ambiance conviviale.
Danielle participe aux activités du Secours Populaire Français, car, pour elle, il est fondamental de s’intéresser aux plus démunis et de combattre l’injustice sociale. Elle offre pour les tombolas de Josiane ses travaux au crochet. Car ses doigts malhabiles pour tant de tâches courantes veulent bien lui obéir pour tenir le crochet. Elle a de ce fait un violon d’Ingres: elle aime marier les laines de couleurs diverses et chatoyantes; elle fait des couvertures, des coussins, des châles, qui rehaussent les présentoirs.
Éprise des causes humaines, voulant combattre pour la justice sociale et l’égalité, Danielle est venue de longue date au Parti Communiste Français. Adhérente dans le 3° Arrondissement de Paris, quand elle habitait Rue de Montmorency, dans le vieux quartier du Marais, nous la retrouvons avec les Camarades de la Cité Universitaire quand elle est Assistante Maternelle à la petite école de la Résidence Universitaire. Puis enfin au Centre Ville quand elle réussit à obtenir son logement adapté.
Danielle, tu nous quittes alors que tu avais encore tant de chantiers à terminer. Ta volonté de traduire t’a amenée à de belles et enrichissantes découvertes:
Avec Monsieur Dario Lara, membre du Service Extérieur de l’Équateur, tu avais réalisé une adaptation de son travail, remarquable d’érudition, sur un voyageur français du 19° Siècle:
Le Capitaine Gabriel Lafond, de Lurcy, a laissé des récits de voyage en Équateur, où il a fréquenté le Général Flores, premier Président de ce pays après l’Indépendance: chemins croisés de notre histoire et de celle de ce pays ami.
Tu avais aussi traduit L’exode de Yangana, une œuvre qui fait date dans l’histoire littéraire de l’Équateur.
Tu as réalisé la traduction. Pourquoi un large public français ne bénéficierait-il pas de ce travail d’un immense intérêt?
Qui viendra reprendre aujourd’hui ces belles et bonnes tâches après toi?
Danielle, personne d’une grande culture et d’un cœur immense, tu as réussi à tisser des liens entre des êtres et des milieux bien différents.
Autour de toi, des amis fidèles t’ont accompagnée dans cette trop courte existence: Michèle, Colette, Josiane, Jean, passaient régulièrement, t’entretenaient un moment, t’aidaient pour des questions pratiques. Tu les as aimés. Tu es venue chez Josiane pour tous les évènements familiaux, pour diverses rencontres avec des Amis péruviens, uruguayens. Te voici soufflant les bougies de ton anniversaire. Tu étais en famille avec nous! Tu aimais bien rompre avec ton isolement. Mais rien n’aurait pu te ralentir dans ton travail, te faire réviser tes choix. Tu refusais les compromis, avant tout avec toi-même.
Petit être de feu, tu lançais parfois des «piques» acérées pour que chacun comprenne l’importance de tes combats. Ton style «hérisson» n’était rien d’autre qu’une manière d’appeler, de solliciter. Peut-être savais-tu que le temps était compté? Mais tu savais aussi très bien témoigner par des éclairs de tendresse, que ton cœur nous était acquis. Nous te voyons avec Flor Alba et son fils adoptif, José Eliseo, ex- enfant des rues: tu es imprégnée d’un sourire de bonté; tu te donnes toute à l’amitié.
Puisse, longtemps encore, ta petite voix nous interpeller. Il y a tant à faire!
Danielle, ce monde a bien besoin d’une révolution, certes sans violences, mais en posant d’une nouvelle manière, peut-être, la question primordiale de la place de l’être humain dans la course au progrès.
Un soir, devant la longue planche qui te servait de table de travail, tu as traduit un poème de Jácome, ton auteur préféré, amoureux de sa région natale: Ballade d’amour à Otavalo, dont voici un court extrait:
——————————
Oh ! Pur enchantement de roses
À la source de Punyaro
Des rosiers aux pétales bleus
Forment d’aquatiques palais.
——————————
La cascade de Peguche
Saute en bonds acrobatiques
Musculature de rivière
Sur un alezan emballé.
Danielle, tu es maintenant dans le jardin d’à côté. Mais tous ceux qui ont participé à ton combat, compris tes sentiments, partagé tes espoirs, en demeurent grandis.
Jean Mallière
————————————————-
Gustavo Alfredo Jácome**
Où pourrais-je écrire ton nom Otavalo?
Dis, sur quels pampres?
Sur quels archanges nés du givre
Sur quels célestes syllabaires ?
Limite du vallon aimé,
Campée sur la Rose des Vents,
Entre les méridiens du cœur:
Au Nord, voici le Cotama,
Le Mojanda se dresse au Sud;
Du Levant viennent les aurores
Vers le Couchant, le crépuscule
Sur l’enclume du Muénala
Se profile de tous ses feux.
Combien d’azurs dans les cours d’eau
Combien de Jourdains aux miracles !
Où donc se termine le ciel?
Où donc commence la campagne?
A la source de Punyaro:
Des rosiers aux pétales bleus
Forment d’aquatique palais.
Grotte de Socavón, la harpe
Au cordage cristallisé
Égrène goutte après goutte
L’arpège de roche en brindille.
Saute en bonds acrobatiques,
Musculature de rivière
Sur un alezan emballé.
L’Imbabura grand travailleur
A son métier d’agriculteur:
Champs de blé océaniques,
Du mât aux panaches d’or,
Des champs de pois humidifiés
Par le nectar blanc et rosé.
Ainsi encensoirs ouvragés,
Du sein desquels la brise file
Un panache fin et bleuté.
Où donc écrirais-je ton nom,
Otavalo? Oui, sur quels pampres?
Sur quels coquelicots blessés?
Ah, Otavalo! Otavalo!
Là où je t’ai toujours porté,
Dans les racines de mon âme,
Dans les profondeurs de mon être.
Et j’ouvrirai tout grand mon cœur
Et tout entier mon flanc lyrique,
Afin que tout le monde lise
Ton nom, tout seul, OTAVALO…
A Rumiñahui (1)
Prestance symbolique
D’héroïsme et de bravoure:
Tu fus vaincu dans ton valeureux effort
Pour conserver la liberté de Quito;
Tu ne parvins pas à triompher mais l’histoire
Garde éclatante ta mémoire
Dans le nom d’une montagne granitique.
Lorsque le Blanc étranger,
Après avoir traversé les vastes mers
En un geste de guerrier
S’en vint conquérir tes foyers patriotes
Tu te dressas furibond et combatif.
Et d’une attitude homérique
Tu t’efforças d’expulser de ta terre
Natale l’armée ibérique.
Chaque rocher était un puissant fortin
Où montait à l’assaut, déployée,
La robuste légion de Benálcazar (2).
Tu résistas bravement, mais en vain,
Face au furieux assaut
Des véloces coursiers du combat
Et de l’arquebuse qui lançait l’éclair.
Héros aborigène, général de Quito
Tu ne parvins pas à triompher mais l’histoire
Conserve éclatante ta mémoire
Dans le nom d’une montagne granitique.
(2) Conquérant espagnol.
Le Lechero de Pucará (3)
Comme si le géotropisme, survivant jusque dans leurs pieds
qui jouxtaient les jachères, les avait irrités.
Alors, le bruit courut qu’on avait vu le Lechero de Pucará
détotémisé, chevaucher, poncho vert au vent,
éperons de nuit profonde sur les flancs d’un alezan emballé.
Sans que ne lui pèsent ni les ans ni les maux de son tronc variqueux.
A Pisaqui aussi.
A Pesillo aussi.
Le Lechero de Pucará s’était fait guérillero.
En gesticulant, il haranguait des fantômes
qui accouraient de partout à son appel.
Sous son chapeau d’ombre il esquivait le visage des éclairs
et leur flash identificateur.
Des escadrons de guerriers emplumés se faufilaient
dans les champs de maïs.
Les ruisseaux affûtaient leurs poignards et leurs couteaux rutilants.
Après les éclairs phosphorescents de la foudre, des attaques de tourterelles
et de perdrix fondaient sur les champs d’orge pleins de lune.
D’arbre en arbre, la conspiration s’étendait
à des murmures de ténèbres.
Vacarme des feuillages qui commencent l’assaut
avec un vent viril à leur tête.
Et le Lechero de Pucará, Ché Guevara ressuscité.
Pour Carabuela aussi.
Pour Latacunga aussi.
Pour Quichinche .
pour Paltaqui.
Pour Cambugán.
Mais tout arrivait la nuit.
Au matin, de nouveau arrê-ê-êté au-dessus du sommet de la colline,
le soleil chassait l’ondée, comme si de rien n’était.
En dessous, la lagune, tour de cristal pur, avait oublié
qu’elle n’était qu’une petite eau de source.
(3) Arbre à lait totémique.
L’Amérique Monumentale
les murailles de Sacsayhuamán, le palais d’Ingapirca,
les autels astronomiques de Tikal et de Teotihuacán,
le mystère tout en pierre de Machu-Picchu (4).
Nos mains et notre âme elle-même dans les pierres préhistoriques.
Pierres de Machu-Picchu, polies de caresses, comme des cuisses de femmes.
Pierres lissées par la langue même de l’eau des ruisseaux
ou le torrent de la pluie bisaïeule.
Pierres rituelles de Tikal, taillées dans l’adoration.
Cailloux qui chantent dans les carrières.
et en elles nos mains et une âme étrangère.
Alors, douleur sur la pierre.
Pierre endolorie.
Pierre des temples de Mexico et de Guatemala,
de Quito et de Lima, travaillées dans la sueur et les larmes,
sous les coups de fouet.
C’est pour cela que, chaque nuit, les pierres des façades,
des parvis et des clochers, pleurent sous les accords du vent.
Lorsque le jour se lève, elles troquent les pleurs pour le chant,
comme si le soleil, en plus de les rendre éternelles,
les rendait aussi musiciennes.
Nous, les indigènes, nous avons une oreille pour cette musique-là.
Parce que nous sommes la partie vivante des pierres.
Parce que nous les avons taillées en partageant leur sort.
Pierres de San Francisco de Quito, de la Cathédrale,
de la Compagnie de Jesús, du Sacré Cœur.
Pierres de la rue des Sept Croix,
avec l’âme des pierres des carrières de Pintag, de Guapulo, de Las Llagas.
Pierres appesanties d’esclavage, attachées à nos tibias
comme les boulets de fer des entraves d’un bagnard.
Cent, deux cents, trois cents ans en monuments de pierre,
Taille que taille, tailleur de pierres, taille le jour et taille la nuit.
(4) Sites archéologiques précolombiens d’Amérique Centrale et d’Amérique du Sud.
L’Amérique Monumentale (suite)
sculpter des saints grandeur nature, succédanés de nos idoles.
Ciselant la pierre en chapiteaux et en frises,
caressant la pierre en visages d’angelots.
Mais de nouveau ce profane de contremaître:
Indiens, il faut ciseler l’ostensoir.
Nous, nous ciselions l’image de notre Dieu du Soleil
pour nous donner le plaisir de couronner les façades des églises et les autels
avec notre Dieu au lieu de celui que nous ne comprenions pas,
mais à l’image duquel ils nous avaient crucifiés.
Indiens, il faut sculpter ces colonnes torses.
Nous, nous taillions le vent enspiralé dans le tourbillon,
avec le même diable bondissant au milieu.
Indiens, allez sculpter ces mascarons.
Nous, nous sculptions le sourire moqueur du soleil
Pour planter notre Dieu sur toutes les façades.
Nous, les Indiens, dans l’Amérique Monumentale.
Depuis Machu-Picchu et Tikal, Ingapirca et Teotihuacán,
jusqu’à San Francisco de Quito et le bâtiment Cofiec.
«Anges des échafaudages» et «Veillée funèbre du maçon».
Pourquoi les hérons s’en sont allés**
* Tapuscrit inédit de 122 pp. (1995) où se trouvent les textes en espagnol et en français:
Balada de amor a Otavalo/Ballade d’amour à Otavalo; pp. 70-73.
A Rumiñahui/A Rumiñahu; pp. 74-75.
El Lechero de Pucará/ El Lechero de Pucará; pp. 77-78.
La América Monumental/L’Amérique Monumental; pp. 78-81.
Notons que dans ce recueil d’autres traductions concernant de nombreux auteurs latino-américains mériteraient d’être publiés: Argentine (José Hernández et Atahualpa Yupanqui), Bolivie (Jesûs Lara et Pedro Schimose), Chili (Pablo Neruda), Cuba (Nicolás Guillén, Carlos Puebla et écoliers cubains), Équateur (déjà cité), Mexique (Gabino Palomarés et Jaime Torres Bodet), Nicaragua (Joaquín Pasos et Rubén Darío), Pérou (anonymes, José María Arguedas et Manuel Scorza), Uruguay (Gastón Figueira).